Le Suppléant : chapitre 2.7

Publié le 15 Juillet 2017

À l'évocation du Directeur, Grosse Tête perdit pour quelques instants de sa belle assurance. Et comme pour venir en aide au Suppléant on entendit la cloche annoncer la fin du cours.

 

OUF !…

 

C'était le moment de déguerpir. Le Suppléant s’empressa vers la sortie, clés encore en main, mais la trouille aux fesses. Éberluer, les apprentis mécanos encore couverts de suie laissèrent tomber leurs outils sur le sol. Le Suppléant en profita pour se mêler aux élèves sortant des classes et ateliers et, bercé par cette foule protectrice, il s'enfuit vers la cafétéria.

 

Vingt minutes plus tard, il y était. Il se planqua dans un coin pour attendre la venue du Directeur et là... attendit. Mais le Directeur ne vint pas. Les étudiants le côtoyant le montraient du doigt et se marraient de le voir si drôlement placardé d'huile. Lui, ne se doutant de rien, guettait toujours la venue du Directeur. À la fin, songeant que Directeur ou pas, sa journée était belle et bien terminée, il résolut de rentrer chez lui ; d’autant que son groupe d’apprenti mécano pourrait finir par le découvrir et lui jeter un mauvais sort.

 

Se faufilant par d'étroits corridors bordés de casiers, il déboucha sur le grand hall qu'il ne reconnut pas et au lieu de se diriger, vers la sortie, il bifurqua dans un long couloir qui l'amena à voir les remarquables installations sportives de la Polyvalente. Gymnases, piscines, badmintons, salles d'exercice, salles de tir, poids et haltères et j'en laisse et j'en passe. Après avoir tourné en rond un bon moment, il ne s'y retrouva plus du tout. Il alla donc s'informer à un surveillant. Ce dernier lui indiqua de poursuivre droit devant jusqu'aux bureaux administratifs, d'emprunter l'escalier mécanique jusqu'au café étudiant et de prendre ensuite par l'atelier de soudure donnant directement sur le stationnement : son chemin personnel favori. Le Suppléant suivit docilement ces instructions et donna dans une toilette des dames. Perplexe, il s'en remit à son instinct et aboutit bientôt à un long couloir qui se terminait sur une porte à poids.

 

À bout de patience, il tira la porte violemment et s'engagea dans un mystérieux passage aboutissant à une porte de chêne qu'il poussa anxieusement. Pour comble de malheur, cette porte donnait en plein bois ; mais le Suppléant malgré son faible sens de l'orientation en forêt décida de s'engager sur le sentier qui s'ouvrait devant lui. Pour rien au monde, il n'aurait voulu revenir sur ses pas. Et fort heureusement, quelques minutes de marche à peine le menèrent jusqu'à une petite rue qui se terminait en cul-de-sac. Il fit un bref tour d'horizon et vit à quelques centaines de mètres le boulevard qu'il avait emprunté le matin pour se rendre à la Polyvalente.

 

Il se dirigea jusqu'au premier arrêt d'autobus pensant que malgré la marche excessive, la Suppléance demeurait un métier peu exigeant en regard de bien d'autres et assez rémunérateur à tout prendre...

 

-Oh !... Le formulaire !

 

Le Suppléant se rappelait justement avoir omis de remplir le formulaire sans lequel on ne pouvait le rémunérer. Il fit demi-tour vers la Polyvalente. Mais il n'avait pas fait trois pas qu'il s'arrêta pile.

 

-Et puis, tant pis! J'aime encore mieux perdre ma journée que d'y retourner.

Et il rentra chez lui.

 

Rédigé par Robert Alair

Publié dans #Le Suppléant

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